Exploration neuropsychologique des troubles cognitifs consécutifs aux lésions cérébrales

 

 

Exploration neuropsychologique des troubles cognitifs consécutifs aux lésions neurodégénératives

Les troubles de l’attention

L’attention est à la base de toute activité consciente et dirigée du cerveau. La validité d’un examen clinique et neuropsychologique requiert une vigilance suffisante du sujet examiné. On distingue l’attention diffuse, qui correspond à un état général d’éveil de tous les sens, et l’attention sélective, qui suppose à la fois l’orientation, la focalisation sur une information ciblée et l’inhibition d’activités concurrentes. L’attention se décline, aujourd’hui, en différentes catégories: attention diffuse, attention focalisée, attention soutenue, attention alternante, attention divisée. Bien que la théorie différencie des types d’attention, en pratique il est difficile de les séparer parce qu’il est rare qu’une seule catégorie soit atteinte isolément. Cependant, la description de catégories de l’attention nous permet de suivre le schéma théorique sur lequel se fondent les tests.

Le ralentissement des processus mentaux a pour conséquence des troubles de l’attention, ainsi que des répercussions sur le fonctionnement cognitif global et sur le comportement. Parmi les structures cérébrales impliquées, le système réticulaire activateur ascendant, l’amygdale, l’hippocampe et le cortex frontal jouent un rôle essentiel (Gil, 1996).

·         Le niveau général de vigilance

Les affections cérébrales sévères, comme une démence ou des déficits verbaux d’origine neurologique (aphasie), entraînent une réduction de l’empan normal d’attention. Il s’agit de sujets qui ne peuvent pas traiter tout ce qu’ils entendent en conversation. Leurs proches signalent des troubles de mémoire, alors que, dans certains cas, ce n’est pas la mémoire qui est déficiente mais l’empan simple du fait d’un ralentissement des processus mentaux.

·         L’attention focalisée

L’attention focalisée est à la base de la concentration mentale. Elle nous permet de cibler des stimuli spécifiques de notre environnement et d’éviter les phénomènes de distraction.

·         L’attention soutenue

Elle permet de maintenir l’attention sur une durée assez longue pour exécuter une tâche spécifique. Les tâches sur ordinateur sollicitent particulièrement l’attention soutenue.

·         L’attention alternante

Elle repose sur la capacité à déplacer rapidement son attention d’un stimulus à un autre, souvent en alternance. Elle fait intervenir la mémoire de travail. Cette fonction est très sensible à toutes les formes d’atteintes cérébrales.

·         L’attention divisée

L’attention divisée est un modèle de la mémoire de travail. Elle permet au sujet de traiter plus d’une tâche à la fois ou bien plusieurs opérations dans une tâche complexe. Comme pour l’attention alternante, l’attention divisée est très sensible à toute atteinte cérébrale.

 

v Les troubles de la mémoire(s)

Les troubles de la mémoire dépendent de la localisation et de l’étendue des lésions cérébrales, du caractère aigu ou progressif de l’affection à l’origine des lésions céré­brales, de l’état général et de l’âge du patient.

L’étude des processus mnésiques doit aussi prendre en compte la subdivision et la spécialisation hémisphérique entre droite et gauche. La mémoire visuo-spatiale est traitée par l’hémisphère droit, la mémoire verbale à gauche.

La clinique distingue aussi la mémoire rétrograde de la mémoire antérograde. L’amnésie antérograde correspond à la difficulté ou à l’incapacité, après des lésions cérébrales spécifiques, à mémoriser des faits nouveaux. Cela se manifeste cliniquement par un oubli à mesure qui empêche la fixation des faits de la vie quotidienne et, altère les capacités d’apprentissage. Lorsque l’oubli à mesure est associé à une désorientation dans l’espace et dans le temps (désorientation temporo-spatiale), à des fausses reconnaissances et à des fabulations, le diagnostic de syndrome de Korsakoff est posé.

L’amnésie rétrograde touche les événements qui se sont produits avant l’atteinte cérébrale, et les faits les plus récents dans le passé sont moins bien récupérés que les faits les plus anciens. Si l’accident neurologique permet une guérison avec récupération de l’état antérieur, l’amnésie rétrograde régresse, mais lorsqu’il s’agit d’une maladie évolutive, comme dans la démence de la maladie d’Alzheimer, l’amnésie rétrograde s’étend et détruit progressivement des pans du passé de l’histoire du sujet.

Schématiquement, la mémorisation comporte plusieurs étapes

·         l’analyse corticale sensorielle des données perceptives (visuelle, auditive, tactile, kinesthésique) qui nécessite l’intégrité des aires associatives du cortex correspondantes;

·         la mémoire immédiate, dénommée aussi mémoire à court terme (MCT/MT). Un des modèles de la mémoire à court terme a été théorisé par Baddeley (1993), sous le concept de «mémoire de travail ». Certains la considèrent comme une forme d’attention. II s’agit d’un système à capacité limitée dans le temps, sollicitant les ressources attentionnelles. Il maintient temporairement les informations pour les coordonner, c’est un processus essentiel dans la compréhension et la résolution de problèmes. Le cortex préfrontal y joue un rôle majeur;

·         la mémoire à long terme (MLT). Elle permet la conservation durable des informations grâce au codage puis au stockage. Elle est organisée sur des modalités de codage sémantique, spatial, temporel et affectif. Ensuite intervient le stockage qui permet le rappel, la reconnaissance des informations. Celles-ci font l’objet d’une consolidation variable en fonction de leur répétition et de leur charge affective. La mémoire à long terme repose anatomiquement sur le circuit de Papez, initialement décrit dans la régulation des émotions (Bachevalier, dans Botez-Marquard et Boller, 2005). Tulving (1983) a défini la mémoire en fonction de son contenu: la mémoire épisodique et la mémoire sémantique. La mémoire épisodique est de nature autobiographique: elle concerne le sujet lui-même. Elle correspond au rappel d’événements ordonnés dans le temps et l’espace, survenus dans un contexte particulier éprouvé par le sujet. C’est le système hiérarchiquement le plus élevé et le plus complexe. Son contenu est fréquemment connoté émotionnellement. Les régions préfrontales y joueraient un rôle plus important que dans les autres formes de mémoire. La mémoire sémantique repose sur les connaissances de faits généraux assimilés dans un contexte culturel donné (le langage, les formules mathématiques, l’histoire).

·         Par ailleurs, un type de mémoire appelé « mémoire procédurale » est décrit. Elle correspond aux aptitudes et aux habiletés sensori-motrices apprises. Pour résumer, ces trois types de mémoire à long terme: mémoire – épisodique et sémantique sont explicites et correspondent au «savoir quoi », alors que la mémoire procédurale est implicite et correspond au «savoir comment ».

·         Enfin, mémoire à court terme et à long terme contribuent aux apprentissages.

v Les troubles des fonctions verbales ou aphasies

Les anomalies du langage appelées « aphasies» se caractérisent par une désorganisation du langage parlé et/ou écrit. Les troubles peuvent concerner l’expression du langage (expression verbale orale et écriture) ou la réception du langage (compréhension du langage parlé et écrit). L’aphasie est définie comme un trouble de l’utilisation des règles qui permettent à un individu de produire et de comprendre un message verbal.

Il faut distinguer de l’aphasie:

 

 

·         des troubles de la voix (dysphonies) liées à des atteintes des cordes vocales;

·         des troubles de l’articulation de la parole (ou trouble de l’élocution) secondaires à des atteintes du système moteur (dysarthries paralytiques, parkinsoniennes ou cérébelleuses;

·         des incohérences verbales liées à une confusion mentale transitoire ou à une pathologie psychotique. Dans ce cas, les incohérences témoignent d’un trouble de la pensée, ce qui revient à chercher diffluences, digressions, barrages de la pensée et idées délirantes.

En fonction des formes d’aphasies, les troubles de la production des messages sont très variés. Aussi, est-il nécessaire d’explorer le langage dans différentes situations. L’analyse de la production des mots permet de distinguer trois niveaux de perturbation: phonétique, phonémique et sémantique. Il n’est pas rare que chez un même patient les productions aphasiques témoignent d’une perturbation intéressant les trois niveaux.

·         L’exploration du langage écrit

Les troubles du langage écrit sont appelés «alexie ». Exceptionnellement, il peut exister des troubles du langage oral sans trouble du langage écrit. En revanche, il n’est pas rare d’observer des troubles isolés du langage écrit.

·         Les principaux types d’aphasie

Nous décrivons ces troubles en opposant l’aphasie de Broca (aphasie non fluente) et l’aphasie de Wernicke (aphasie fluente), même si cette opposition est aujourd’hui mise en cause, à la lumière des connaissances sur la connectivité cérébrale. Les aphasies qui se manifestent par une réduction de l’expression du langage sont appelées aphasies non fluentes. À l’inverse les aphasies sans réduction de l’expression du langage sont appelées fluentes

1.       L’aphasie de Broca

Elle touche le versant expressif du langage. Ce type d’aphasie se caractérise par une réduction, voire la suspension du discours, dénommée «aphasie non fluente ». Dans certains cas, les malades parlent mais peu, avec des stéréotypies verbales et une désintégration phonétique, elle-même accompagnée d’une apraxie bucco faciale (difficulté ou incapacité à effectuer les mouvements de la bouche et de la face qui accompagnent l’expression orale). De ce fait, la répétition de mots est laborieuse et difficile à réaliser. Il existe, un trouble de la lecture et de l’écriture (dysorthographie). En revanche, la compréhension orale est peu perturbée. L’aphasie de Broca est habituellement concomitante d’une hémiplégie droite. La lésion se situe dans une zone cérébrale de l’hémisphère gauche, décrite par Broca (aire de Broca) en 1861. La mélodie du chant est souvent épargnée, ce qui peut favoriser la rééducation de la parole par la répétition de mots et phrases «chantés ».

2.       L’aphasie globale,

Décrite par Déjerine, elle se caractérise par une disparition de l’expression orale, un compréhension quasi nulle et une impossibilité de lire, écrire, dénommer et répéter. Elle est souvent associée à d’importantes lésions de l’hémisphère gauche, avec ou sans hémiplégie droite associée.

3.       L’anarthrie pure

Décrite par Pierre Marie, elle se manifeste par un mutisme ou une expression orale réduite, liée à d’importantes perturbations phonétiques. Les épreuves de répétition sont échouées ou confirment les troubles phonétiques de l’expression orale spontanée. En revanche, la compréhension, la lecture non parlée et l’expression écrite sont préservées.

Les aphasies sans réduction de l’expression du langage sont appelées aphasies fluentes:

4.       L’aphasie de Wernicke

Elle a été décrite par l’auteur du même nom, en 1874. Elle se caractérise par des troubles massifs de la compréhension du langage parlé, alors que le langage exprimé est conservé mais souvent logorrhéique. Ce langage logorrhéique contient des paraphasies pouvant aboutir à un jargon qui altère la qualité de l’information produite par le patient.

L’aphasie de Wernicke est secondaire à une lésion siégeant au niveau d’une région constituée par la partie postérieure des première et deuxième circonvolutions temporales gauches (zone de Wernicke). Dans certains cas, la lecture et l’écriture mettent en évidence une alexie et une agraphie de sévérité variable. L’alexie se caractérise par une perte de stratégie perceptive de la lecture: le patient lit la fin ou le milieu des mots d’une phrase. L’agraphie correspond à un déficit de la stratégie constructive des mots.

5.       L’aphasie amnésique.

Elle se caractérise par un manque du mot, alors que les épreuves de compréhension, de répétition, de lecture et d’écriture sont préservées.

6.       L’aphasie de conduction.

Il existe d’importantes perturbations du langage spontané. La compréhension de la lecture est préservée mais la lecture à haute voix est déformée. L’écriture présente des paragraphies sous dictée (les mots sont écrits de manière anormale). Les épreuves de répétition et de dénomination montrent des paraphasies.

v Les troubles de la perception

Le sens que nous accordons à nos sensations, provoquées par des phénomènes externes et/ou internes, repose sur les processus perceptifs. Ceux-ci participent à notre connaissance du monde environnant et sont appelés gnosies. Les messages élémentaires perçus se projettent au niveau de zones corticales définies – occipitales, temporales, pariétales – puis c’est au niveau du cortex associatif, où les lobes frontaux jouent un rôle essentiel, que les différents messages sont rassemblés et organisés pour aboutir à l’identification perceptive, qui dépend de nos ‘expériences passées et aussi du langage.

Les défaillances perceptives peuvent résulter de lésions à différents niveaux des processus perceptifs, c’est-à-dire au niveau de l’organe sensoriel lui-même (par exemple l’œil, l’oreille…), au niveau des aires primaires du cortex et des noyaux sous-corticaux qui agissent sur les caractéristiques sensorielles les plus simples (forme, couleur), ou encore au niveau des aires corticales supérieures où les perceptions élémentaires s’intègrent pour devenir des images, des concepts. Les conséquences d’une déficience de ces structures successives diffèrent selon la complexité des fonctions interrompues.

La perte d’une faculté de perception, qui ne s’explique pas par une atteinte de l’organe sensoriel lui-même (œil, oreille …), est désignée par le terme « agnosie ». Schématiquement, le traitement de l’information visuelle dépend des régions occipitales du cortex cérébral, le traitement spatial dépend des zones pariétales et l’identification pour la/par reconnaissance dépend des régions temporales. Les déficits consécutifs à l’atteinte de ces régions s’accompagnent, fréquemment, d’un phénomène appelé «anosognosie » c’est-à-dire une méconnaissance de ses propres troubles. L’anosognosie peut être totale ou partielle, temporaire ou permanente selon la gravité des séquelles neuropsychologiques. Ce phénomène, d’origine lésionnelle, est à différencier des mécanismes de défense de type déni et dénégation, même si parfois ils coexistent.

·         Les déficits de la sphère visuelle

1.       La cécité corticale

Elle correspond à une cécité d’origine cérébrale, par opposition aux cécités d’origine oculaire. Le patient se comporte comme un aveugle devant toutes les stimulations visuelles alors que le fond d’œil est normal. C’est la conséquence de la destruction bilatérale des zones de projection primaire des voies visuelles au niveau du cortex occipital. Étonnamment, le patient ne reconnaît pas (anosognosie) qu’il est aveugle, même s’il se cogne aux obstacles et ne peut se déplacer seul. Des hallucinations visuelles élémentaires ne sont pas rares. Et les troubles mnésiques, avec une désorientation temporo-spatiale, sont constants.

2.       Les agnosies visuelles

Ce sont des troubles de la reconnaissance visuelle. Alors que ses sensations visuelles sont préservées, le patient ne peut reconnaître certaines composantes de l’environnement visuel, par défaut d’intégration sensorielle, au niveau du cortex. Les agnosies visuelles peuvent intéresser les images, les formes, les objets, les couleurs, ou les visages, ou s’associer entre elles. Lorsqu’une agnosie touche un seul hémi champ visuel (droit ou gauche), il s’agit d’une hémi-agnosie.

Il existe différents types d’agnosies

§  L’agnosie des formes. Elle se caractérise par une incapacité à discriminer les figures géométriques élémentaires (carrés, ronds, triangles …), ce qui se traduit par une difficulté ou une impossibilité à identifier des objets et des images alors que l’acuité visuelle est intacte. Pour les images, il y a une mauvaise différenciation entre le fond et la forme. Ce trouble est la conséquence de lésions occipitales qui peuvent être bilatérales, mais qui impliquent préférentiellement l’hémisphère droit.

§  L’agnosie des couleurs. Le sujet éprouve des difficultés à désigner les couleurs qui lui sont présentées alors qu’il n’a pas perdu la vision colorée. En effet, il est capable de classer un ensemble de dégradés de même couleur. Il éprouve également des difficultés à évoquer les couleurs lorsqu’on les lui demande : par exemple «Quelle est la couleur d’une tomate? Quelle est la couleur des épinards ? ». Il procède au même type d’erreurs sur une épreuve de coloriage. L’agnosie des couleurs traduit une lésion occipitale gauche.

§  L’agnosie des mots ou alexie. Le sujet ne reconnaît plus les mots. Celle-ci peut se rencontrer alors que l’écriture spontanée est correctement conservée. Elle est la conséquence d’une lésion occipitale gauche.

§  L’agnosie des visages ou prosopagnosie. C’est une perturbation isolée de la reconnaissance des visages familiers dans la vie quotidienne ou sur des photographies. Les sujets n’identifient pas non plus les personnages publics célèbres. Les patients peuvent se plaindre d’une telle difficulté ou bien paraître indifférents. Ce trouble est souvent en rapport avec des lésions occipitales bilatérales ou droites.

§  Les agnosies spatiales. Les troubles de la perception spatiale sont liés à des lésions postérieures, particulièrement de l’hémisphère droit. L’agnosie spatiale, appelée aussi négligence spatiale unilatérale intéresse, chez un sujet droitier, l’hémichamp visuel gauche. Les stimuli visuels situés dans cet hémichamp sont ignorés. Ces troubles sont, souvent, associés à un déficit visuo-constructif, à une agraphie, à une alexie, à une asomatognosie (troubles du schéma corporel).

v Troubles auditifs

Dans le cas de la sphère auditive, seules les lésions bilatérales corticales produisent des troubles perceptifs auditifs patents. Les lésions unilatérales peuvent être à l’origine soit d’une surdité verbale, soit d’un trouble n’apparaissant que dans certaines situations expérimentales. L’absence d’identification des sons, alors que le récepteur auditif fonctionne normalement d’après l’audiogramme, est appelée «agnosie auditive ».

o   La surdité corticale est liée à des lésions temporales bilatérales du cortex auditif primaire. Les patients ne peuvent pas identifier la signification des sons qu’ils entendent (bruits familiers, musique, message verbaux) alors qu’il n’existe pas de surdité au sens perceptif élémentaire à l’examen d’audiométrie. Elle est toujours associée à des troubles de l’expression du langage.

o   La surdité verbale pure est observée au cours des lésions cortico-sous-corticales temporales gauches. Ce trouble s’intègre habituellement dans l’évolution d’une aphasie de Wernicke. Le patient est dans l’incapacité de comprendre le langage parlé alors qu’il ne présente pas d’atteinte de la production du langage. Il peut parler, lire, écrire (à l’exception de l’écriture dictée). Le patient se plaint d’une difficulté à «entendre» ou bien a l’impression d’entendre une langue étrangère qu’ un «fredonnement indifférencié » (Gil, 1996).

o   Les agnosies paralinguistiques. Elles touchent la reconnaissance émotionnelle des messages verbaux et l’identification de celui qui émet ces messages.

o   Les déficits perceptifs auditifs particuliers -. Les techniques d’écoute dichotique (épreuve où le sujet reçoit simultanément, à chaque oreille, des messages différents) ont mis en évidence une prévalence de l’hémisphère gauche pour les messages verbaux et de l’hémisphère droit pour les messages non verbaux. Ainsi, une lésion temporale droite semble être à l’origine de certains déficits musicaux aboutissant à une agnosie de la musique. Celle-ci se caractérise par une incapacité à reconnaître les mélodies: rythme, intensité, hauteur tonale, durée, mémoire mélodique.

 

 

 

v Les déficits de la sphère tactile

Parmi les troubles neuropsychologiques impliquant la sphère tactile on retrouve, les agnosies tactiles ou astéréognosies. Elles correspondent à l’incapacité d’identifier les objets par la palpation, le tact, dans des situations où il n’y a pas recours au support visuel. Gil (1996) décrit quatre niveaux de traitement de l’information lors de la palpation d’objet:

1 / le niveau des sensations élémentaires: froid, chaud, rugueux, lisse … ;

2 / le niveau des perceptions de la forme et des matières: rond, long et étroit…, métal, verre … ;

3 / le niveau d’identification ou niveau des associations: l’objet peut être reconnu;

4/ le niveau des dénominations: l’objet reconnu peut être nommé. À cette dernière étape, il peut exister un déficit tactilo-verbal, alors l’objet sera reconnu mais pas nommé. Les déficits aux niveaux 2 et 3 correspondent aux astéréognosies. Les troubles du niveau 4 correspondent à ce qu’on appelle anomie tactile.

v Les troubles du schéma corporel ou asomatognosies

La connaissance que nous avons de notre corps s’appelle somatognosie, elle correspond au schéma corporel. Cette connaissance repose aussi sur le langage, par désignation et intégration psychique des parties de notre corps, au cours du développement. La privation partielle ou totale de cette connaissance perceptive est appelée «asomatognosie ».

L’illusion du «membre fantôme ». Ce phénomène se produit à la suite de la suppression, généralement brutale, des afférences périphériques sensitives – amputation d’un membre – mais il peut aussi s’observer dans le cadre de lésions des voies sensitives à la suite d’une section de la moelle épinière. L’illusion correspond au fait que le patient a des, sensations au niveau du membre qui n’existe plus (membre fantôme) : douleurs, impressions kinesthésiques bizarres, sensations de transformation corporelle au niveau de ce membre fantôme.

Les troubles conceptuels du schéma corporel ou autotopoagnosie. Ils sont consécutifs à une lésion de la région pariétale postérieure gauche. L’autotopoagnosie correspond à la difficulté à dénommer et à désigner, ou à reconnaître d’une façon générale, les parties du corps, découlant d’une désorientation dans l’espace corporel à la suite d’une atteinte pariétale gauche et ne s’associant pas à une désorientation dans l’espace extracorporel. Dans certains cas, il y a perte de l’image mentale du corps humain mise en évidence dans le dessin. L’atteinte est bilatérale ou unilatérale gauche, mais le déficit est bilatéral.

L’hémi-asomatognosie gauche. Chez un sujet droitier, elle s’accompagne habituellement d’une hémiplégie gauche. Elle est la conséquence d’une lésion pariétale droite. Les patients nient leur déficit moteur (anosognosie), ils ignorent, oublient et négligent leur hémicorps gauche, qui peut être vécu comme étranger à soi et ont souvent des hallucinations kinesthésiques.

·         La négligence spatiale unilatérale ou hémi négligence

La négligence pour un côté de l’espace ou héminégligence correspond à l’incapacité à être attentif et à orienter une action vers l’hémi-espace et l’hémicorps (Gainotti et al., 1989). Elle est concomitante d’une lésion cérébrale du côté opposé à l’hémicorps. En effet, une lésion cérébrale sévère à droite entraîne une paralysie gauche alors qu’une lésion cérébrale à gauche entraîne une hémiplégie droite. L’héminégligence survient, donc, après une lésion pariétale gauche ou droite. Les accidents vasculaires cérébraux et les traumatismes cranio-cérébraux, en sont les causes les plus courantes.

Ce phénomène est d’origine lésionnelle et involontaire. Il n’est pas lié à un déficit sensoriel ou moteur élémentaire et il ne s’explique pas par un affaiblissement intellectuel important. Il s’accompagne, souvent, d’une anosognosie partielle ou totale. Le patient peut avoir une négligence pour :

– l’espace personnel (son propre corps) : par exemple, il/ elle «oublie» de se raser ou de se maquiller un côté du visage;

– l’espace de représentation mentale: si on lui demande de dessiner une maison, un cube ou une marguerite, il ne dessine que la partie droite et uniquement sur la partie droite de la feuille de dessin;

– l’espace péripersonnel (autour de son corps) : il ne mange que la moitié droite de son assiette, sans se rendre compte qu’il n’a pas touché à la moitié gauche; l’espace extra-corporel (espace en général): il néglige tout l’espace gauche et se cogne aux obstacles du côté gauche.

De tels troubles induisent, parfois, des délires somatophréniques (qui ont trait au corps), en dehors de toute affection psychiatrique. Il arrive que des patients expriment des sensations d’étrangeté et/ou d’attaque corporelle. Par exemple, le bras est perçu comme n’étant pas le sien, ou bien encore détaché du corps et/ou situé hors de soi, par exemple derrière la porte de la chambre; ou encore, la main du côté lésé est menaçante: «une main m’a attaqué cette nuit ». Bien sûr, l’entretien clinique et le recueil de l’histoire des troubles est toujours indispensable pour établir un diagnostic différentiel.

v Les troubles des habiletés gestuelles ou apraxies

Les apraxies correspondent à des perturbations des activités gestuelles qui ne peuvent s’expliquer ni par une atteinte motrice, ni pat une atteinte sensitive élémentaire, ni par un affaiblissement intellectuel global sévère. Si le mouvement peut se définir comme le déplacement des segments du corps, le geste implique à la fois une intention et une finalité. Tout mouvement dépend d’une représentation spatialisée élaborée par le cortex pariétal associatif.

L’activité gestuelle est variée. Elle met en jeu des gestes simples et des gestes élaborés à travers l’utilisation d’objets, l’imitation et l’expression gestuelle symbolique. Il faut savoir que l’apraxie peut passer cliniquement inaperçue, lorsque le patient est peu gêné dans les actes de la vie courante. Les apraxies peuvent affecter uniquement les membres supérieurs ou bien d’autres parties du corps, comme le déplacement des membres inférieurs ou encore les mouvements bucco-faciaux. En outre, lorsque l’apraxie affecte un seul côté du corps (droit ou gauche) il s’agit d’une apraxie unilatérale, si elle touche les deux parties du corps (à droite et à gauche), c’est une apraxie bilatérale.

L’apraxie idéomotrice est décrite par Liepman au début des années 1900. Les troubles se manifestent dans les gestes simples, qui ne nécessitent pas de manipulation d’objets réels. Le patient est incapable d’une quelconque ébauche gestuelle ou bien celle-ci est abrégée ou donne lieu à des persévérations de fragments de gestes exécutés précédemment. Les apraxies idéomotrices peuvent être bilatérales ou unilatérales. Le cortex pariétal gauche est le plus souvent en cause.

L’apraxie idéatoire correspond à l’incapacité à utiliser des objets réels de la vie courante. Elle touche particulièrement la succession de gestes élémentaires nécessaires à la réalisation, d’un acte complexe comme se peigner avec une brosse à cheveux, mettre la table, mettre une lettre dans une enveloppe et la cacheter. Les gestes sont incomplets, incohérents et inappropriés à l’objet et à la tâche à accomplir. Le patient ne sait plus utiliser les objets, il les manipule de manière maladroite, désorganisée et inefficace. Il existe une perplexité et parfois des persévérations. L’apraxie idéatoire s’observe dans le cas de lésions temporo-pariétales gauches et au cours de lésions diffuses responsables d’une démence.

L’apraxie constructive. Les compétences constructives nécessitent le maniement de données visuo-spatiales dans une démarche programmée, sollicitant les activités motrices. L’apraxie constructive correspond à un trouble isolé de l’exécution de tâches constructives bi (2D) ou tridimensionnelles (3D). L’apraxie constructive est fréquente en clinique, elle s’observe surtout dans les lésions pariétales droites mais parfois aussi gauches. Lors de lésions pariétales droites, le déficit est surtout d’origine visuo-spatiale. Les dessins sont désarticulés, désorganisés sur le plan topographique. Très souvent s’y associe une négligence spatiale gauche. Lors de lésions pariétales gauches, le dessin est simplifié, avec des difficultés dans la réalisation des détails.

L’apraxie de l’habillage. Le patient a des difficultés à s’habiller. Il ne peut pas disposer, orienter, manipuler, enfiler ses vêtements, bien qu’il n’ait pas de troubles de la motricité, ni d’apraxie idéatoire ou idéomotrice. Ce type d’apraxie s’observe au cours de lésions pariéto-occipitales de l’hémisphère droit et s’accompagne généralement d’une hémi-asomatognosie et d’une apraxie constructive. L’apraxie de l’habillage est fréquemment présente dans la maladie d’Alzheimer.

L’apraxie mélokinétique. Elle se manifeste par des difficultés à exécuter des mouvements fins et qui se succèdent. Elle serait liée à une perte de la mélodie cinétique, entravant la réalisation motrice de l’acte. Ce sont surtout les aires frontales prémotrices qui sont en cause.

L’apraxie de la marche. Le sujet est dans l’incapacité de disposer ses membres inférieurs de manière adaptée. Il ne peut plus avancer correctement, en alternance une jambe après l’autre et le reste du corps a tendance au déséquilibre vers l’arrière. L’apraxie s’accompagne d’un trouble de l’initiation du mouvement avec, par exemple, une difficulté à s’installer en position couchée, ou bien à retourner son corps dans la station allongée. Cela se produit, alors que le patient comprend la consigne et que ce n’est pas une douleur physique qui explique l’incapacité. L’apraxie de la marche serait due à des lésions frontales bilatérales.

L’apraxie buccofaciale. Elle concerne les mouvements bucco-linguo-faciaux (bouche, langue, joues). Les patients ne peuvent pas effectuer des mouvements bucco-linguo-faciaux sur ordre, alors qu’ils peuvent de manière automatique déglutir, mastiquer. Ce type d’apraxie accompagne fréquemment l’aphasie de Broca. Les lésions concernent les régions frontales droites ou gauches

v Les troubles liés aux syndromes frontaux

Maladie d’Alzheimer

Maladie de Parkinson

Démence à corps de Lewy